31/10/2013
La conférence 8
La conférence (8)
En haut des gradins, les larbins apportent un guéridon de plastique doré, incontestable réussite du mauvais goût. Ils placent le meuble entre les deux partenaires, puis servent les boissons, une bouteille de vodka, une autre de whisky, sous la surveillance du majordome. Le valet s’occupe de sa maîtresse, et la soubrette de son maître. Leur empressement et leurs sourires cadavériques dénoncent l’intimité des rapports, laquelle excède le cadre strictement hiérarchique. Les amours ancillaires présentent bien des avantages, pour les serviteurs comme pour les employeurs : la commodité spatio-temporelle, et la possibilité de pratiquer un échangisme de bon aloi.
Sous la surveillance du majordome, le mâle boit le whisky, la femelle la vodka. Pendant la conférence, les squelettes ne cesseront de s’alcooliser avec un admirable entêtement. A la santé de l’une et de l’autre, la buveuse et son buveur de cercueil trinquent. Peut-être souhaitent-ils aussi la victoire du libre-échangisme commercial et sexuel. A maintes reprises, la soubrette et le valet rafraîchissent les verres, où joyeusement tintent les glaçons. Les deux poivrots n’auraient-ils pas tort de réfréner leur soif de feu, alors qu’ils ne craignent plus le coma éthylique ?
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