Miséreuse conversation (3)

Manuel du  misanthrope (1)

Miséreuse conversation

 

III

 

    Il est assez facile de répertorier les thèmes, qui se représentent à chacune de ces réunions, amicales ou familiales. Entre eux, il existe une hiérarchie, laquelle peut être variable selon le groupe et les circonstances, mais la plus commune me semble être la suivante : 1° la santé, ou plutôt que la santé, la maladie ; 2° le travail rémunéré, car ce qui ne rapporte pas d’argent ne mérite pas le beau nom de « travail » 3° les enfants, leurs études et leur avenir professionnel ; 4° les loisirs des membres du groupe ; 5° les actualités, puis les problèmes de société chroniques ou récurrents, tels que la corruption des hommes politiques, leur goût pour l’ambition personnelle, le chômage, la délinquance, la violence réelle ou cinématographique, etc.… 6° la météorologie.

   

  (I) (Extrait d’Ecritures en miroirs)

Miséreuse conversation (2)

Manuel du  misanthrope (1)

Miséreuse conversation

 

II

 

    Si nous entendons par « pensée » la production d’idées véritablement neuves, il me semble difficile que cela puisse naître et se développer au milieu d’un groupe, lorsque le fonctionnement de celui-ci exige l’accord préalable de tous, ou du moins de la majorité. Précisément, parce que le groupe déjà constitué (association, famille, amis) nécessite le consensus, la conversation se nourrit d’idées communément acceptées, ressassées, polies comme les galets par l’océan, que nous nommerons « Mer de la Platitude ».

   

 

    (I) (Extrait d’Ecritures en miroirs)

 

 

Miséreuse conversation(1)

Manuel du  misanthrope (1)

Miséreuse conversation

   

     Qu’il est doux de se taire ! La conversation n’est que rarement le lieu de la réflexion, d’abord parce qu’il est presque impossible de penser collectivement, sauf à réunir des spécialistes, soit d’une même discipline, soit de disciplines différentes, qui réfléchiront tous ensemble sur un même sujet. Dans ce cas-là, il ne s’agit plus de converser, mais de constituer un groupe de travail, ce qui est bien autre chose que l’échange sans but, poli mais souvent terne. Même au cours de réunions avec pour objectif clairement défini l’avancement de la réflexion, la recherche peut rencontrer bien des obstacles, en particulier la rivalité entre personnes exerçant la même discipline, chacune d’entre elles voulant être maîtresse du jeu. Le désir de briller, de paraître meilleur que ses concurrents, nuit souvent à la collaboration authentique.

 (I) (Extrait d’Ecritures en miroirs)