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17/08/2013

Le fouineur 7

Le fouineur (7)

 

    «  Si les gens ne lisent plus dans leurs loisirs, que font-ils, demandai-je à Mme la Conservatrice.

    - Lorsqu’ils ne travaillent pas,   ils regardent la télévision, pratiquent des sports, bricolent et jardinent, mais ils lisent quand même les livres que vous avez vus dans les étages supérieurs.                       

    - Je vous comprends, mais dans les volumes disponibles … là-haut, sauf erreur de ma part, aucun lecteur ne trouvera jamais le moindre atome de littérature, d’imagination, de recherche sur le langage ni de beauté des mots.

    - Ce sont là des notions parfaitement obsolètes, que nous avons délaissées depuis longtemps, à Santa Soledad. L’essentiel n’est pas là, Mr. Mywords. Les choses dont vous parlez ne sont que des luxes, des superfluités sans rapport avec la vie réelle des travailleurs. Mieux vaut s’en tenir à l’efficacité industrielle, augmenter la rentabilité, conquérir des marchés, maximaliser les profits, voilà qui donne du sens à la vie, remplit les assiettes et met du beurre dans les épinards, tandis que toutes les phrases pompeuses de vos écrivains ne nourrissent personne. »

   

(Extrait du roman Et passent les rats, en vente sur ce blog)

 

 

 

 

10:08 Publié dans Romans | Lien permanent | Commentaires (0)

16/08/2013

Le fouineur 6

Le fouineur (6)

 

    L’autorisation fut accordée sans objection majeure. Il me fallut pourtant exhiber mon passeport et ma carte de séjour, puis compléter un formulaire qui permettrait de m’identifier, donc de décharger la responsabilité du Conservateur, en cas de perte de livres par exemple.

    « Je vais guider Mr. Mywords dans les sous-sols, Luis. A plus tard. »

    Ce fut en ces termes que Mme Alejandra Papelero s’adressa à son soliveau de mari. Elle contourna le guichet, m’enjoignit de la suivre, emprunta le cliquetant et pesant trousseau de clefs qui pendait à la ceinture de M. le Conservateur, et nous prîmes l’ascenseur, boîte exiguë, sombre, malodorante et bruyante, qui nous mena sans dommage à l’enfer de la Bibliothèque de Santa Soledad.

    Ce lugubre lieu ferait passer un frisson d’angoisse dans le dos du plus calme et du plus courageux des hommes. L’éclairage y est minimal, jaunâtre et clairsemé. Les auteurs s’y entassent là, avec la mine renfrognée de qui se sait relégué dans les limbes. Tous, ils sont là, poètes, dramaturges, nouvellistes, romanciers, philosophes, essayistes, méticuleusement classés par ordre alphabétique et par langues, mais les volumes sont couverts d’une couche de poussière qui suffit à prouver le désintérêt total des habitants de Santa Soledad pour la littérature.

  

(Extrait du roman Et passent les rats, en vente sur ce blog)

 

 

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15/08/2013

Le fouineur 5

Le fouineur (5)

 

   Ce disant, il me désigna la jument préposée au prêt des livres. Mentalement, j’essayai d’établir le lien marital entre ces deux êtres physiquement si opposés, car, plus qu’à l’étalon, Luis Papelero s’apparente au chacal. Le rapprochement me parut si incongru que je faillis m’esclaffer, mais je maîtrisai la malséante hilarité. Aussi me contentai-je d’un sourire que je voulus aimable, sans être sûr que ma mimique exprimait réellement l’amabilité.

    «  Ah, Madame est votre épouse… Je suis ravi de faire votre connaissance à tous les deux. Bien sûr, je vais m’acquitter de ces démarches administratives au plus vite, car je ne pense pas rester plus d’un mois à Santa Soledad, sauf si je découvrais des éléments nouveaux concernant la civilisation des Maztayakaw. Je vous remercie pour les renseignements. Néanmoins, s’il m’était permis d’accéder au sous-sol, afin d’y compulser des documents de moindre valeur historique, mais de grande valeur intellectuelle, en relation avec le sujet que je veux traiter, je vous en serais fort reconnaissant. » 

 (Extrait du roman Et passent les rats, en vente sur ce blog)

 

 

 

 

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