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05/08/2013

la mission de Marnay 5

La mission de Paul Marnay (5)

    « Comment se porte votre nombreuse et belle progéniture, mon cher M. Marnay ?

    - Très bien, mon Père. Mon éposue et moi-même, nous nous efforçons de les élever en vertu des meilleurs principes. Cela n’est pas facile à notre époque, où l’irréligiosité, le cynisme et l’athéisme s’affichent avec la plus vile impudeur.

    - Ce n’est pas moi qui vous contredirai, mon fils. L’aîné travaille au collège du Rédempteur, n’est-ce pas ?

    - Effectivement, Philippe y est surveillant depuis deux ans. Parallèlement à cela, il suit des cours de Droit par correspondance.  

    - Et la nièce de mon ami, l’abbé Citrin,   une certaine Marie-Ange, est également surveillante au collège du Rédempteur. Je la connais assez bien. C’est une chance, pour une école chrétienne, d’avoir pu recruter deux jeunes adultes, qui présentent les meilleures garanties de moralité, pour la surveillance des dortoirs. L’initiative du pensionnat mixte avait fait frémir certaines paroissiennes mais, finalement, nous pouvons parler de succès.

    - Je puis aussi vous assurer  que les études dirigées ou surveillées sont assurées avec le plus grand sérieux et un maximum d’efficacité, sans parti pris pour Philippe, bien sûr. Marie-Ange et lui se connaissent depuis la petite enfance et se considèrent comme frère et sœur. Ils forment le meilleur tandem possible.  

    - Je n’en doute pas le moins du monde, M. Marnay, mais venons vite à l’affaire qui vous amène ici. Je présume que vous avez hâte de savoir ce que nous attendons de vous, mon fils. »

       Extrait de Entre muraille et canal

 

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04/08/2013

La mission de Marnay 4

La mission de Paul Marnay (4)

 

   Il régnait, dans le bureau, l’odeur âcre et persistante du tabac refroidi. La fenêtre donnait sur une cour intérieure, humide et profonde entre les hauts murs. Même en juillet,  la spacieuse pièce conservait des zones d’obscurité, où le regard ne pénétrait qu’avec peine. L’utilisateur du lieu était assis le dos tourné vers la fenêtre, si bien que son buste formait un obstacle entre la luminosité de l’été, d’une part, et le regard de son vis-à-vis, d’autre part, qui en était réduit à supputer les expressions du directeur diocésain, alors que celui-ci lisait le déroulement des impressions et sentiments sur la face de  l’interlocuteur, du moins celles et ceux que M. Marnay ne parvenait pas à celer. Il ne serait pas abusif de supposer que la table de travail était sciemment orientée de façon à faciliter la tâche d’observation de l’abbé Heurtebise, d’où l’on peut inférer, avec un risque minimal d’erreur, que le spectre du Grand Inquisiteur se dressait derrière le siège directorial, perpétuant de subtile manière ce qui, cinq siècles plus tôt, se pratiquait sans la moindre subtilité.   

       Extrait de Entre muraille et canal

 

 

 

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03/08/2013

La mission de Marnay 3

La mission de Paul Marnay (3)

    « Que puis-je pour vous, Monsieur, s’enquit une quinquagénaire efflanquée, porteuse de lunettes cerclées de métal noir.    

    - J’ai rendez-vous avec l’abbé Heurtebise, Madame. Je m’appelle Paul Marnay.                                         

    - Ah, oui, notre directeur est en rendez-vous, mais il aura bientôt fini. Veuillez-vous asseoir. »

    L’attente ne dura pas plus de cinq minutes. La porte du bureau directorial s’ouvrit, le prêtre et son visiteur échangèrent une poignée de mains et Paul Marnay fut invité à entrer.

    Comme à son habitude, l’abbé Heurtebise était sévèrement sanglé dans le costume gris anthracite, sur lequel la chemise blanche étalait une tache de clarté, partagée en son milieu par la cravate noire. Dans le domaine de la calvitie, le prêtre avait une vingtaine d’années d’avance sur l’assureur. C’est dire que même le plus consciencieux des  coiffeurs eût été en peine de trouver matière à satisfaire l’appétit des ciseaux, sur l’œuf d’autruche qui tenait lieu de crâne à l’abbé Heurtebise. A la différence de Paul Marnay, qui déjà marchait un peu voûté, le directeur diocésain se tenait droit comme le « i » du mot Justice, avec l’adjonction de l’adjectif  divine pour renforcer la comparaison. Le regard de l’homme était direct mais pas inquisiteur, car même au sein de l’Eglise romaine, apostolique et catholique, la Sainte Inquisition n’était plus religieusement correcte. A cause de l’usure du temps, même les plus nobles des institutions se trouvent discréditées.    

    Extrait de Entre muraille et canal

    

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