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06/05/2015

ulysse 31

Ulysse, l’œuvre multidimensionnelle (31)

(Conférence, donnée au LAC, le 12 avril 2014)

 

Troisième partie

 

 

17 Ithaque, la patrie d’Ulysse

   Le chapitre est bâti comme un questionnaire. Un interro-gateur anonyme veut toujours plus de précisions. L’interrogé répond, inlassablement, et fournit les détails à foisons. Joyce semble se détacher de la littérature.

    Nous apprenons plus de choses sur Bloom que dans tous les autres épisodes : sa taille, son poids, les titres des livres sur les rayons de sa bibliothèque, les caractéristiques de sa maison de rêve, des données astronomiques, le chemin suivi par l’eau de pluie jusqu’au robinet, dans un style impersonnel, où chaque chose est nommée.

   L’action est décomposée en ses moindres mouvements, la mécanique et la physique sont minutieusement analysées, si bien que  l’action est suspendue. La masse des mots engloutit la narration. Un désir obsessionnel s’affiche, de s’assurer de la réalité des choses, comme dans L’Odyssée, où Ulysse se demande s’il est bien arrivé à Ithaque.  L’ironie est facilement perceptible, dans le ton détaché. Malgré tout, la narration avance, à pas minuscules. Joyce appela ce chapitre « le vilain petit canard ».

    De même que Stephen n’a plus ses clefs, Bloom a oublié les siennes. Il pénètre chez lui en sautant par-dessus la grille, puis par l’arrière-cuisine.

    L’hôte se fait une toilette de chat, mais l’invité n’en fera pas, car son génie et l’eau sont incompatibles. Il ne s’est pas baigné depuis le mois d’octobre et se méfie de la limpidité, y compris dans l’expression ! Quant à Bloom, il a essayé de trouver dans la littérature sérieuse les réponses aux questions existentielles qu’il se posait, sans les y trouver….

    L’hôte offre un chocolat chaud à l’invité. Toujours maus-sade, ce dernier refuse l’hospitalité pour la nuit, leur commu-nion se réduit à une miction, dans la cour, puis le jeune homme part.

 

 

30/04/2015

Ulysse 30

Ulysse, l’œuvre multidimensionnelle (3O)

(Conférence, donnée au LAC, le 12 avril 2014)

 

 Troisième partie

 

16 Eumée, le fidèle porcher d’ Ulysse

    L’épisode commence par « Avant toutes choses », mots apparemment creux, puisque chaque chose en précède une autre. Pourquoi cela, si tard dans la narration ? Serait-ce une manière de nous mettre en garde ?

   Comme la démarche des protagonistes, le style dénote la fatigue. Il se démonte lui-même, en accumulant les conces-sions. Le comique résulte d’une excessive prudence.

    L’équivoque est entretenue sur l’identité du narrateur, par le jeu des « il » et « lui » puis « leur », qui conduit à « Bloom Stoom » et « Stephen Blephen ». Il devient difficile de savoir qui parle. Le doute s’installe, quant à la véracité du récit.   

   Bloom rend canne et chapeau à Stephen, dépoussière ses vêtements et l’aide à marcher. Il cherchent un fiacre, mais n’en trouvent pas. Bloom prononce un discours moralisateur, sur les dangers de l’alcool, les sorties nocturnes et la fréquentation des prostituées. Il critique  la police, qui protège les riches, mais tire contre les pauvres. Il réprouve la lâcheté des amis de Stephen, qui l’ont  abandonné. L’aîné donne des conseils paternels au jeune. Il devrait se méfier de Mulligan, le profiteur.

    Ils entrent à l’Abri du cocher, bar mal famé. Bloom offre un café et des biscuits à Stephen. Dehors, des Italiens parlent fort, Bloom suggère au poète d’écrire dans cette langue. Réponse désabusée. Un marin ivre aborde Stephen, lui demande son nom et dit connaître son père. L’homme assure que Simon est un « véritable irlandais ». Le marin conte des voyages  invrai-semblables, mais ne connaît pas Gibraltar. Comme on doute de sa parole, il exhibe un couteau et relate le meurtre d’un homme, à Trieste…

   Les buveurs parlent de tempêtes ; le matelot affirme que sa médaille pieuse l’a sauvé de bien des périls. Elle rappelle le voile magique, confié à Ulysse, par une nymphe.    

   Bloom emmène Stephen chez lui. L’aîné se demande si le jeune a la voix de son père ; il rêve d’opéras et de gains mirifiques. Stephen chante dans la rue, ce qui conforte Bloom dans ses rêves.

 

 

 

 

24/04/2015

Ulysse 29

Ulysse, l’œuvre multidimensionnelle (29)

(Conférence, donnée au LAC , le 12 avril 2014)

 

Deuxième partie

 

15 Circe, l’enchanteresse qui transforme les compagnons d’Ulysse en porcs.

    Le merveilleux, le fantastique et l’horrible constituent l’essentiel de l’épisode. Cela contredit l’affirmation de Joyce, selon laquelle il aurait rigoureusement appliqué une méthode réaliste. A moins que nous ne considérions le déroulement cinématographique des hallucinations de Bloom et Stephen comme une application du principe de réalité.

   Mulligan et Stephen vont par le train, chez Mme Bella Cohen, maquerelle ; Bloom aussi, mais séparément. Il est minuit.

   Circé s’impose comme le chapitre du déguisement.  Bloom y apparaît en plusieurs tenues différentes. Joyce s’écarte plus encore de la narration traditionnelle. Le normal et le fantastique s’entremêlent. Des objets, tels que les boutons, les casquettes et les arbres parlent ; un coq pond un œuf, les heures de la nuit dansent, le fantôme de sa mère apparaît à Stephen, Bloom se transforme en soubrette. Les instructions scéniques déterminent l’action.

   Les secrets de Bloom et Stephen nous sont dévoilés. L’intériorité devient réalité objective. Tout ce qu’ils cherchent à refouler leur saute à la figure. N’oublions pas que l’époque découvre le freudisme. L’hallucination devient réelle. Tout ce qui arrive semble à la fois familier et extrêmement étrange. Stephen et Bloom se rappellent leur passé, Circé se souvient du passé textuel. Des personnages déjà vus ou entrevus resurgissent, des anecdotes sont transposées, refaçonnées.

   Pour ne citer qu’un exemple, Bella la tenancière se transforme en homme et maltraite Bloom, réduit à accomplir les tâches les plus humiliantes. La scène tourne au sadisme. Bloom connaît toutes sortes d’aventures et de mésaventures, tour à tour proscrit, condamné à mort, puis saint, monarque aux pouvoirs surnaturels.

   Deux choses sont pourtant avérées : Stephen s’est battu contre un soldat, Bloom a empêché son arrestation ; de plus, il veille sur la bourse du jeune fêtard.