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26/11/2013

Jean Genet 7

Jean Genet : Vers une écriture réflexive 7

 

 A cela, il me faut ajouter le faisceau de thèmes connus pour être scandaleux : « l’éternel couple de la Sainte et du criminel », c’est-à-dire l’association du pédéraste ou du « Mou » avec le « Dur ou Mac », le deuxième utilisant le premier de toutes les façons possibles, par exemple en lui donnant les missions les plus périlleuses ; la recherche de l’abjection, perçue comme idéal ; la gloire de l’assassin qui marche vers l’échafaud.

    Est-ce à dire que, lorsque nous avons lu un livre de Genet, la lecture des suivants serait superfétatoire ? Certes non, car dans chaque nouveau livre, l’écrivain élargit son champ imaginaire. Suivons cette démarche pas à pas, d’abord à travers les « romans », chants d’amour et de haine homosexuels et criminels.

 

 

Article paru en 2010, dans Art et Poésie de Touraine et Florilège.

 

 

 

 

08:49 Publié dans Essais | Lien permanent | Commentaires (0)

25/11/2013

Jean Genet 6

Jean Genet : Vers une écriture réflexive 6

 

 

   Parlons de la parenté formelle entre Proust et Genet. Le second a déclaré avoir lu A l’ombre des jeunes filles en fleurs en prison. De cette lecture il garda une très forte impression. Proust et Genet partagent, d’une part, le même goût pour l’attitude esthétique  face au réel et, d’autre part, cette propension à la ruse, qui les pousse à s’introduire dans un milieu social, Proust chez les snobs, Genet parmi les voyous, pour ensuite décortiquer et railler travers et sottise.

    Si cinq des livres de Genet parurent sous l’étiquette  romans, il n’y faut voir que la nécessité de rassurer le lecteur, qui veut acheter une marchandise aux caractéristiques connues. Genet lui-même n’entretenait aucune illusion à ce sujet, si nous en croyons les paroles que nous a rapportées Sartre :

    « Mes livres ne sont pas vraiment des romans, car aucun des personnages n’y prend de décision par lui-même. »

    Puis, Sartre analyse de quelle façon « maniaque » Genet programme la destruction de ses personnages, dont il annonce la mort au début de chaque livre. Prisonnier, impuissant à maîtriser  le destin, Genet se comporte en démiurge sadique à l’égard de créatures, dont certaines sont chargées de réaliser, dans le théâtre d’ombres, divers aspects potentiels de sa personnalité, par exemple le travesti prostitué ou le maquereau, le voleur et l’assassin. 

L’épaisseur psychologique est absente ; Genet l’avoue sans ambages : tous ces « petits mecs » se ressemblent. Ils sont méchants, sots, pervers, cruels, lâches, prêts à se trahir mutuellement.  Leur beauté physique n’enferme que laideur morale. 

 

Article paru en 2010, dans Art et Poésie de Touraine et Florilège.

 

 

 

09:11 Publié dans Essais | Lien permanent | Commentaires (0)

24/11/2013

Jean Genet 5

Jean Genet : Vers une écriture réflexive 5

 

Genet, poète ou romancier ?

 

    Si une seule phrase devait résumer l’entreprise de Genet, celle qui précède conviendrait mieux que tout autre. Elle affirme la mission  du véritable écrivain, qui se refuse à jouer le rôle de saltimbanque. Le créateur est possédé par ses créatures. Il s’agit de nous mener le long de chemins abrupts, vers des crêtes ou des gouffres. Genet choisit la voie prométhéenne. Il n’a cure de plaire ou de séduire. Lorsqu’il commence d’écrire, il n’a pas la moindre ambition carriériste ou mondaine et n’en aura pas plus par la suite. Le premier « roman », Notre-Dame-des-Fleurs déstabilise le lecteur tant du point de vue moral qu’esthétique. « Weidman vous apparut… », voilà le début de ce poème onirique : la célébration d’un bel assassin.

    Genet ne construit pas  ses récits sous le rigoureux contrôle de la logique. Lorsqu’il se met à le fréquenter, le lecteur est décontenancé par les nombreuses ruptures, qui peuvent laisser l’impression d’histoires complètement décousues.  Les périodes et les lieux se rapprochent ou même s’enchevêtrent, selon les règles d’une autre logique, celle du rêve et de la poésie. C’est bien pour cette raison qu’il s’est lui-même défini comme poète. Au fil des pages foisonnent symboles et métaphores, folles images, scènes grandioses ou grotesques, horribles ou merveilleuses.

    Des années sont résumées en quelques phrases, alors que de brefs moments s’étirent à nous donner le vertige, comme dans la Recherche proustienne.

 

   Article paru en 2010, dans Art et Poésie de Touraine et Florilège.

 

 

 

10:18 Publié dans Essais | Lien permanent | Commentaires (0)