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11/03/2013

Voyage au Pays d'Haistybradu (13)

Voyage au Pays d’Haistybradu (13)

   

   De mes poumons la putréfaction comblait chaque alvéole. Les rats s’étaient enfouis dans des trous qu’eux-mêmes avaient probablement creusés. Reportant le regard sur la charogne, j’achevai de me convaincre que nous avions interrompu le festin. L’uniforme déchiré pendait en lambeaux. Les nécrophages avaient déjà bien entamé leur mets succulent.

    Le ventre et la poitrine étaient traversés par une crevasse aux lèvres boursouflées et violacées, dans laquelle les asticots s’adonnaient à leur immémoriale mission de nettoyage. Telles des loques pitoyables et sanguinolentes, les viscères dégoulinaient entre les cuisses zébrées de griffures. A en juger par l’état du mort, la pendaison devait remonter à quelques jours.

    Le douanier s’était-il suicidé ou l’avait-on assassiné ? Dans la première éventualité, nous n’avions rien à craindre pour notre sécurité. Dans la seconde, qui m’assurerait que les meurtriers ne se cachaient pas dans les parages, prêts à occire le téméraire voyageur solitaire, afin de le détrousser ?

   

09:38 Publié dans Nouvelles | Lien permanent | Commentaires (0)

10/03/2013

Voyage au Pays d'Haistybradu (12)

Voyage au Pays d’Haistybradu (12)

 

   Un gros homme vêtu d’un uniforme, dont la couleur était devenue inqualifiable, se balançait au bout d’une corde, nouée à un crochet fixé au plafond. Sous le cadavre gisait une chaise. Sur le sol s’étalait le drapeau national, souillé de mares d’urine et de petites collines d’excréments. L’âcre parfum de l’une et l’affreux bouquet de l’autre se conjuguaient ; les rehaussait la pourriture émanant du pendu.

    Des rats, que notre intrusion avait dérangés, nous firent face, prêts à combattre. Je n’eus pas même à employer mes armes. D’un seul bond meurtrier, Roc provoqua la déroute de l’ennemi, saisit le moins leste des fuyards entre ses mâchoires, qui rompirent la colonne vertébrale. Aussitôt après sa victoire, mon chien sortit pour dévorer sa proie en plein air. Il était certainement autant que moi incommodé par l’atmosphère viciée. Qu’il se nourrît d’une chair elle-même engraissée de restes humains ne m’offusqua pas. L’âme de la prétendue « création », son éternelle souveraine, la seule que nul être ne conteste, se nomme la Faim.

  

10:18 Publié dans Nouvelles | Lien permanent | Commentaires (0)

09/03/2013

Voyage au Pays d'Haistybradu (11)

Voyage au Pays d’Haistybradu (11)

 

   La puanteur m’évoqua instantanément l’image d’un pays en guerre. Il me sembla qu’elle parachevait l’abandon et le malheur, illustrés par l’absence de surveillance. Elle expulsa l’idée même de la vie vers d’inaccessibles limbes. Ensuite, je remarquai que le drapeau national ne flottait point sur l’édicule. Cette négligence n’équivalait-elle pas à la renonciation de la souveraineté ?

    A la porte je frappai, mais aucune voix ne me répondit. Seuls quelques couinements s’échappèrent du silence. Je ne pouvais plus guère douter de ce que le poste fût déserté.  Désirant pourtant vérifier cette impression, je m’apprêtai à y pénétrer, mais auparavant et par précaution, j’inspirai abondamment l’air extérieur. A Roc, lequel à chaque instant manifestait une nervosité croissante, j’intimai le calme, sans obtenir de lui l’obéissance totale. Revolver en main, je poussai le battant sans poignée. Nous entrâmes.

   

 

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