Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

26/06/2013

Le gêneur 8

Le gêneur innocent 8

 

Le voyageur saisit le premier train en partance pour l’étranger. Le désillusionné ne croyait pas pour autant trouver au-delà de la frontière une herbe plus verte qu’elle ne l’était en deçà. Peu lui importait vers quels inconnus, accueillants ou menaçants, il se dirigerait. Le souci principal était de s’éloigner de ces gens qui l’avaient maudit. Pendant trois jours et trois nuits, le fuyard ne descendit d’un train que pour monter dans un autre. Il fut harcelé par l’obsession d’enchaîner les destinations, d’étirer entre le point d’origine et celui d’arrivée des milliers de kilomètres. Durant septante et deux heures, il roula, dormit assis, se nourrit de sandwichs, fruits, chocolat et café.  

    Parce qu’il ne pouvait plus qu’écrire ses questions ou réponses, le stylographe ne quitta plus guère sa main gauche. Au cours de la fuite, Meddler apprit qu’il avait pénétré un pays en guerre contre lui-même. L’anticonformiste songea que, dans ces conditions de danger omniprésent, nul ne pourrait plus échapper à ses vérités. L’hypothèse suffit à le convaincre de jeter son dévolu sur un enfer terrestre. Dans la Capitale, il s’arrêta.

     Nouvelle extraite de Au creux du Styx 

09:30 Publié dans Nouvelles | Lien permanent | Commentaires (0)

25/06/2013

Le gêneur 7

Le gêneur innocent 7

 

   Les arguments favorables au      mouvement ou à  l’immobilité  s’annulaient mutuellement. Aussi se résigna-t-il à jouer le destin à pile ou face.

    «  - Face, ici je m’englue. Pile, là-bas je m’aventure pensa-t-il. »

    La pièce annonça pile. Le taciturne partit.

    Son père avait été plus enclin à bourlinguer qu’à jardiner. En héritage, il ne lui avait légué qu’une besace de cuir, distendue par les périples. Le bagage paternel serait le sien. L’émigrant y mêla l’atlas, le linge, la savonnette, les stylographes, la boussole, le bloc-notes, la brosse à dents, le carnet à dessin, le tube de pâte dentifrice, des crayons jaillis de l’arc-en-ciel, des vêtements pour les quatre saisons, deux ou trois serviettes de toilette, un flacon de shampoing, des partitions vierges, le peigne, une paire de sandales, une autre de bottes fourrées, ses livres préférés, enfin une copieuse réserve d’espoir lyophilisé, en boîtes de douze sachets.

 

        Nouvelle extraite de Au creux du Styx

08:57 Publié dans Nouvelles | Lien permanent | Commentaires (0)

24/06/2013

Le gêneur 6

Le gêneur innocent 6

 

Or, ce muet avait été polyglotte. Avec élégance et recherche, il avait maîtrisé six langues étrangères. Désormais, le Gêneur ne connaîtrait plus pour interlocuteurs que les murs de son silence. Sur sa personne la pression s’accentua. Il essaya par écrit de leur expliquer l’horreur exemplaire de sa situation. Les normaux ne voulurent pas le croire. Ils se persuadèrent qu’il tentait de les duper. Les menaces de sévices se multiplièrent. Demeurer malgré tant d’hostilité devint inenvisageable. Par ailleurs, même en dehors des considérations de sécurité, le choix entre partir ou rester conservait-il un iota de sens ?

    En un autre lieu, trouverait-il la paix, que pour la construction de l’œuvre multiforme, il nécessitait ? Partout, les menaces dégénéraient en conflits, lesquels s’infectaient telles les plaies sur le corps du lépreux. De partout, la haine suppurait. L’insécurité envahissait la planète.

        Nouvelle extraite de Au creux du Styx

 

10:11 Publié dans Nouvelles | Lien permanent | Commentaires (0)