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21/05/2014

La peur 2

La peur 2

 

A l’arrière-plan de cette véhémence et virulence, traînaient des gémissements de supplication, et la supplique aux sons pâteux, très mal articulés, rappelait la voix paternelle, aussi  enlaidie que celle de la mère, quoique d’une manière différente, car   démesurément étirée vers le haut, rachitique et  squelettique. 

     Ce qui de la nuit s’élevait, en brisait la tranquillité, n’était pas un dialogue. Il était patent que les adversaires ne s’écoutaient pas, ni ne voulaient s’entendre.  Deux monologues se juxtaposaient, qui avaient  commencé en pleine solitude, sur la scène de ce théâtre intime, où l’on se joue la tragi-comédie de l’existence.  Sous couvert de l’obscurité, les deux discours parallèles et antagonistes  se débondaient, telles les eaux sales dans le caniveau, déchargeant les poisons du ménage. Plus rarement, le fracas d’un objet sur le carrelage, le bris d’une assiette se pulvérisant contre le mur.

09:03 Publié dans Romans | Lien permanent | Commentaires (0)

20/05/2014

La peur 1

La peur 1

 

    Pour Georges, au commencement de la mémoire, il y eut la peur, une peur tellement abominable qu’elle fouaillait ses boyaux, puis se muait en terreur.

    Le garçonnet ne comprenait pas ce qui se passait en bas, au rez-de-chaussée. Courroucés, des cris s’élevaient ; une voix féminine les projetait, qui vaguement ressemblait à la voix maternelle, mais comme à un visage aimé, l’image cauchemardesque d’une figure reflétée dans un miroir déformant, et en l’occurrence horriblement élargie, comme si la personne avait été brusquement atteinte d’obésité.  La voix même de la colère, venue de très loin, de mémoires antérieures à celle du fils, où son inexpérience ne lui permettait pas d’accéder. Georges entendait une kyrielle de reproches et des aboiements rageurs, auxquels il ne comprenait rien.

 

     

09:13 Publié dans Romans | Lien permanent | Commentaires (0)

20/08/2013

Le fouineur 10

Le fouineur (10)

 

   Là, je fus encore plus étonné par le rejet de la musique et du chant que je ne l’avais été par celui de la littérature :

    « Vous n’allez tout de même pas me dire qu’il n’arrive pas aux gens d’ici de chantonner, de fredonner ? 

     - Ces habitudes anciennes étaient ridicules et non productives. Nous sommes des gens sérieux, à Santa Soledad, Monsieur. »

    J’étais mouché d’importance. Prudemment, j’optai pour un silence désapprobateur mais me réservai le droit d’approfondir l’étude des particularités de la ville.

    Au détour d’une allée, entre des montagnes de livres délaissés, nous entendîmes un cri aigu, suivi d’un trottinement rapide. A deux ou trois mètres de nous filèrent le museau pointu et moustachu, le corps noir et dodu, la longue et fine queue…

    Pour la première fois depuis mon arrivée à Santa Soledad, sa Majesté le Rat s’était manifestée à moi, sous sa forme charnelle et fuyante. »

 

(Extrait du roman Et passent les rats, en vente sur ce blog)

 

 

 

 

 

10:04 Publié dans Romans | Lien permanent | Commentaires (0)