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31/10/2013

La conférence 8

La conférence (8)

 

   En haut des gradins, les larbins apportent un guéridon de plastique doré, incontestable réussite du mauvais goût. Ils placent le meuble entre les deux partenaires, puis servent les boissons, une bouteille de vodka, une autre de whisky, sous la surveillance du majordome. Le valet s’occupe de sa maîtresse, et la soubrette de son maître. Leur empressement et leurs sourires cadavériques dénoncent  l’intimité des rapports, laquelle excède le cadre strictement hiérarchique. Les amours ancillaires présentent bien des avantages, pour les serviteurs comme pour les employeurs : la commodité spatio-temporelle, et la possibilité de pratiquer un échangisme de bon aloi.

    Sous la surveillance du majordome, le mâle boit le whisky, la femelle la vodka. Pendant la conférence, les squelettes ne cesseront de s’alcooliser avec un admirable entêtement. A la santé de l’une et de l’autre, la buveuse et son buveur de cercueil trinquent. Peut-être souhaitent-ils aussi la victoire du libre-échangisme commercial et sexuel. A maintes reprises, la soubrette et le valet rafraîchissent les verres, où joyeusement tintent les glaçons. Les deux poivrots n’auraient-ils pas tort de réfréner leur soif de feu, alors qu’ils ne craignent plus le coma éthylique ?    

 

 

Nouvelle extraite de Au creux du Styx, en vente sur ce blog.

 

 

 

08:49 Publié dans Nouvelles | Lien permanent | Commentaires (0)

30/10/2013

La conférence 7

La conférence (7)

 

 

   Le Conférencier ne semble pas s’apercevoir de ces mouvements. Sur le bureau, croisant lui aussi les jambes, pour mieux révéler des charmes avares, il s’est assis. Son regard fouille le Vide, où se dilue l’acuité visuelle. Un soupir méditatif gonfle puis creuse la poitrine. Alors, il descend du bureau, de la paume droite lisse coquettement les plis de sa jupette, et s’enfouit dans le fauteuil de cuir marron, de si vastes dimensions qu’il pourrait accueillir sans difficultés la monstrueuse anatomie d’un milliardaire américain atteint d’obésité. Sur le plateau, le métaphysicien appuie les coudes, et sur le visage applique les deux paumes. Messieurs les Stratèges aux visées nécessairement  humanitaires, vous pouvez déclencher le spectacle des gentilles bombinettes à neutrons. Rien ne peut nous arriver, puisque le Veilleur veille. 

 

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08:55 Publié dans Nouvelles | Lien permanent | Commentaires (0)

29/10/2013

La conférence 6

La conférence (6)

 

 

      La luxueuse robe est frappée, à la hauteur de ce qui fut le très regretté postérieur, les symboles tant redoutés de la faucille et du marteau. La cavalière et son cavalier dansent avec un charme d’outre-tombe, que ne désapprouveraient pas le gentil Frankenstein ni son comparse, l’aimable Dracula. Le spectacle désincarné ne trouble pas le Professeur. Lugubrement s’achève le tango.  Le squelette masculin s’incline devant sa macabre compagne. Il dépose sur les phalanges féminines un baisemain débordant de ferveur glacée. Les rideaux s’ouvrent largement.

    Apparaît le trio domestique : un squelette en livrée de soubrette, un autre en costume de valet, tous deux sous les ordres d’un tout aussi squelettique majordome. Les serviteurs déposent sur la scène deux fauteuils de cuir, à droite le noir, à gauche le rouge. Sur le premier flambe le triomphal drapeau de la Libre, Démocratique, Noble et Libératrice Amérique ; sur le second luit faiblement l’étendard de la Fière et Pourrissante Russie. Les danseurs s’asseyent, le mâle à droite, la femelle à gauche, qui croise haut les jambes, de manière à dévoiler ses formes inexistantes, espérant peut-être aguicher la domesticité.

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